dimanche 28 février 2016

En présence du Bien-aimé


Elle se dirigeait vers la mosquée. La chaleur, écrasante, ne semblait pas l'affecter, elle incommodait pourtant les badauds qui s'empressaient d'entrer dans l'enceinte pour profiter de la climatisation. Son esprit était ailleurs, aujourd'hui sera un jour irremplaçable, celui qu'on appelle plus communément, le plus beau jour de sa vie.

Pas après pas, elle songeait à cette rencontre improbable, inespérée, tant désirée. Son cœur s'emballait à l'idée de rencontrer son amour caché. Elle se savait privilégiée et passait son temps entre sourire et larme, tentant de camoufler son humeur à l'aide d'un niqab qu'elle remontait quand l'envie lui venait.
Arrivée en ce lieu béni, elle interrogeait son cœur sur maintes questions, observait ses notes sur les règles d'usages, elle voulait que tout soit parfait. Elle avait tant rêvé de lui, tant prié pour lui, tant pleuré pour lui... Lui, son bien-aimé.

Aucun de ses apprêts n'a servi. A la vision d'un des murs de sa chambre, elle ne put résister à l'appel de cet occupant. Elle brûlait tant d'amour qu'elle quitta la file qu'elle avait tenu durant de longues heures et éclata en sanglot. Dans son passage, elle agrippa une tige de bois puis la plaça face elle afin de faire barrage. Face à elle, des tombeaux mais également la direction de la Mecque ; elle débuta par deux unités de prière en guise de remerciement pour ce fabuleux cadeau de son Seigneur (il est permis de prier à cet endroit, un mur sépare la chambre de la salle de prière). A la fin de celle-ci, elle adressa ses salutations à la meilleure des créatures, le remercia pour tous ses sacrifices. Son cœur, battait dans sa poitrine, désirant plus que tout voir celui qui occupe tant de place en son sein. 

Elle resta là, immobile, la tête entre les mains à sangloter. Ces larmes, particulières, flambaient d'amour ardent et leurs brûlures sera elle l'espère, salvatrices. D'autres fois, elle souriait entre deux larmoiements pour lui exprimer son affection. Elle aurait aimé agir autrement mais son corps en était incapable. Cet homme, béni de Dieu, avait sacrifié sa vie pour elle, pour qu'elle connaisse La vérité ; il s'était fait battre, humilié, insulté, a refusé à son confort personnel pour le bonheur d'autrui ; on assassina ses proches mais il priait pour la guidée de ces bourreaux. Il incarnait la perfection humaine et l'exemple à suivre. 

Jamais elle ne pleura autant d'amour pour un homme, il me semble même qu'il était le seul. Ce privilégié attirait les foules, les amoureux de toutes places lui rendaient visite. Il est le sceau des Prophètes, l'Élu de Dieu.

« Ô Allah ! Que la paix et Tes bénédictions soient sur notre Bien-aimé Prophète Muhammed, ainsi que les prières de tous les croyants et de toutes les croyantes, dans les contrées orientales, les contrées occidentales, dans les pays plats, dans les montagnes, sur la terre ferme et sur la mer, ainsi que mes prières, celles de mes parents et mes aïeux, autant de prières que les astres qui illumine Ton Trône, autant de prières que le nombre de Tes paroles, autant de prières que ce que Ta Science dénombre, autant de prières que ce que Ton Livre embrasse ».

La paix voguait au-dessus des âmes et se heurtait quelques fois à des corps trop lourd d'affliction. Elle fut touchée et cette confrontation modifia à jamais sa conception du bonheur.

Elle réintégra la file d'attente après cette parenthèse qui dura en réalité une éternité. La fatigue et une douleur dorsale la saisissait mais rien ne pouvait plus la refréner, elle avait tant attendu ce jour que seule la mort aurait pu lui barrer la route. Elle avançait lentement, on la bousculait mais elle était dans une optique de pardon et répliquait par des sourires. L'excitation de ces femmes, venues des quatre coins du globe était décelable et compréhensible. Les cultures et le dévoilement des émotions étaient différents d'un continent à un autre. Elle avait grandi dans un foyer où il était coutume de se contenir pour ne rien dévoiler. Elle se couvrait le visage pour qu'on n'entrevoie pas son teint rougeâtre, qui d'ordinaire était blafard. Elle ne pouvait cacher ses yeux bouffis où la plupart des vaisseaux étaient apparents. Qu'importe, elle s'approchait inéluctablement du lieu de rencontre. On la chahutait de toutes parts mais elle semblait séjourner dans un monde parallèle et vivait littéralement le bonheur. Elle n'était plus qu'à quelques pas de lui et songeait à sa condition prospère, elle qui vivait à plusieurs milliers de kilomètres de celui qui lui enseigna chaque action de son quotidien, la voie de la réussite et de la félicité.

Arrivé devant la grande porte, on fit signe aux trois premiers rangs de s'asseoir, elle s'assied. Elle n'était plus qu'à quelques mètres de l'endroit qu'elle considère comme le meilleur au monde, là où repose le corps béni du Bien-aimé d'Allah*. Les larmes ne pouvaient cesser et lorsqu'elle croisait d'autres amantes en larmes, elle pleurait de plus belles.

Il était temps, elle entrait tranquillement dans le respect de l'usage, on la bousculait mais rien ne semblait la perturber. Elle se plaça sur Al-Rawda, reconnaissable par des tapis rouges, lieu considéré comme un jardin du paradis, positionné entre la chaire du Prophète* et sa maison. Elle y pria deux unités de prière dans lesquelles elle remercia grandement Son Seigneur pour l'immense bienfait qu'Il lui accorda. Consciente de son privilège et dans une volonté d'étouffer toute ambiguïté, elle choisit de réciter la sourate Al-Kafiroun (109) pour rejeter tout associé à son Seigneur puis poursuivit par la sourate Ikhlass (112) afin d'affirmer cette fois Son Unicité la plus pure. Son degré d'amour pour le Seigneur et Son Prophète* était incomparable, l'un devait être accompagné d'acte d'adoration, l'autre non. Elle fit très attention à ne pas franchir ces limites, imposées par les lois d'Allah.

Honorer de prier en ce lieu, son cœur ne pouvait s'empêcher de penser à son tête à tête. Cette rencontre ne pouvait être que particulière...

Elle s'approcha ensuite du mur le plus proche. Sa curiosité n'étant pas rassasiée, il lui fallait une meilleure visibilité. Elle saisit une chaise puis se suréleva pour voir à travers les moucharabiehs recouverts d'or dont les sublimes calligraphies représentaient des passages du Coran et le nom des locataires de cette chambre funéraire. L'ornementation était très belle, à l'image de ces trois hommes à la destinée fabuleuse.

La niche centrale était celle de notre Bien-aimé Prophète* et les autres, celles des deux premiers califes du monde musulman : Abu Bakr As-Siddiq et 'Omar Ibn Al-Khattab (qu'Allah les agrée). Elle les salua avec quiétude et voix basse puis transmis les salutations de ses proches et eut enfin un monologue avec le Prophète de la miséricorde*. Les morts entendent les vivants, elle le savait, elle n'attendait ni réponse ni signe sortit d'un conte fantastique, elle désirait juste lui exprimer sa gratitude et son amour sans rien demander en retour. Ses réponses elle les avait toutes, il les avait transmis par l'intermédiaire du Coran et de la Sunna.

« Je témoigne que tu as transmis le message, que tu as bien remis ce qui t'a été confié, que tu as conseillé ta communauté et que tu as lutté dans la voie de Dieu comme il le faut [...] ».

Elle séchait ses larmes, fatiguée et satisfaite, elle avait le cœur en paix. Elle descendait de son piédestal et céda son tour aux suivantes et s'en alla en se retournant quelques fois en souriant.
Jamais elle n'était allé au bout de ses rêves, elle avait réalisé une chose nouvelle et le trio que formait son âme, son esprit et son cœur, s'accordaient sur le fait qu'un point culminant du bonheur avait été atteint et qu'aucune chose matérielle en ce monde n'avait su et n'aurai su étancher.
Il faut le vivre pour le croire. Aucune théorie ne remplacera une pratique et aucune règle ne remplacera la spontanéité d'une amante.

H.B.


2 commentaires:

  1. Comment ne pas avoir les larmes aux yeux et revivre "la rencontré " l incomparable rencontre avec l adoré alih elsalat wa essalam, elsalam alik ya habibi ya rassou Allah , mes pieds touche ton sol , mes mains touche Ton univers , mes poumons respirent Ton air , ya habibi ya rassou Allah , mes larmes ne s arrêtent pas , mon coeur vit une sérénité indescriptible, mon âme s' oublie ici même , si c'est un rêve ne me réveillez pas si c'est une réalité ya ALLAH prends mon âme ici près de mon adoré alih elsalat wa essalam.
    Baraka Allah fik pour ce précieux partage, très beau , rien à rajouter. Merci

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